Les événements se sont précipités. Atlas Régies était une constellation d’une dizaines de planètes provinciales placées chacune sous l’autorité de ce que l’on appelait un baron. Atlas Régies assurait la régie publicitaire d’une grande partie de la presse quotidienne sidérale et appartenait à la SA Futur Atlas Médias, premier groupe interstellaire de Kommunication universelle, qui dépendait à son tour du groupe Atlas, premier groupe galactique de Kommunication avancée.
Puis la Nationale des Eaux entra dans le capital du groupe Atlas.
Jésus Lemessie, son président, las de limiter ses talents à marcher sur les flots, finit par noyer Paul Daumier, président du groupe Atlas. Sur des ambitions intergalactiques, Jésus Lemessie tronçonna rapidement le groupe Atlas en bazardant tous les astéroïdes qui n’apportaient rien à ses appétits de nouvelles technologies. Les barons visionnaires avaient dit : “Il nous gardera. Les nouvelles technologies c’est bien beau, mais il nous gardera parce qu’il aura besoin de contenu. Et le contenu, c’est nous.” Jésus, sans doute peu époustouflé par le génie du contenu, s’empressa de brader Atlas Régies pour un franc symbolique au groupe Hamelin de Peretti Médias, premier groupe intersidérale de presse, et qui lui-même dépend du groupe Hamelin, premier groupe d’édition de la voûte étoilée, qui appartient à son tour au groupe de Nevers, premier groupe céleste multiservices de tous les premiers groupes multifonctions pluri-culturelles.
Les exarques, mes anciens tenanciers, se sont échappés fissa dans les buissons avec leurs indemnités. Et puis il y a moi, désormais conscient de ma juste valeur – un franc, juste pour le symbole –, modeste rescapé et infinitésimale conséquence de cette guerre intergalactique, prostré au fond de mon placard, planqué et bien à l’abri sur l’étagère du bas pour éviter qu’une photo satellite ne vienne surprendre mon intimité professionnelle.
René-Franck BONNEL©2004